Par Mots et par Vies

Instant de honte

Ce soir là, j'avais une réunion. Une amie est passée me chercher pour que nous y allions ensemble. Au moment du départ un coup de téléphone nous annonce que la rencontre est annulée. Nous décidons de sortir quand même et d'aller prendre un verre. Nous voilà touristes dans notre propre ville. Un mardi soir pluvieux et doux. Nous nous installons sur la Grand place, sous un grand parasol, devant un chocolat. Agendas sur la table, nous donnons des nouvelles des amis, de ceux qui vont bien et ceux qui vont moins bien, nous parlons de nos groupes chrétiens. Au loin du bruit, de la musique, des voix.

Avant de rejoindre la voiture, nous décidons d'aller voir ce qui se passe. Devant l'opéra, un attroupement joyeux, avec des banderoles acclamant Michel Sardou ! Ah bon, il chante encore !

Au milieu de ce tohu-bohu, une autre musique attire nos oreilles, assis parterre, une loupiote devant eux, des jeunes d'un autre style chantent des cantiques, entourés par des jeunes comme eux, qui veillent à la sécurité. Une banderole de la manif pour tous est posée derrière eux.

Et là, tout à coup, j'ai honte.

Comment expliquer cela ?

Honte parce que je suis catho comme eux et pourtant pas comme eux.

Je ne me reconnais pas dans cette Église de classe, de purs, de propres sur eux.

Non je ne suis pas pure et je partage pleinement les doutes, les tâtonnements, les joies et les espoirs des hommes de ce temps. Non je ne suis pas propre et je revendique même de me salir les mains, le cœur et l'âme à fréquenter les rues, les trottoirs, les bistrots, à écouter des histoires parfois sordides et quelques fois jolies, à pleurer et à rire.

Il y a une chose dont je suis sûre : Jésus de Nazareth, tu avais les pieds sales, à marcher obstinément

sur nos routes humaines. Ça me fait du bien, rien que d'y penser.

Je ne comprends rien à cette croisade contre le mariage gay et elle me blesse. Si c'était vraiment le sort des enfants qui était le souci, quelle merveilleuse mobilisation pourrions-nous espérer pour venir

en aide aux enfants Roms qui vivent la misère dans notre propre pays. Pourtant il n'en sera rien et

nous le savons bien. Il ne s'agit pas de cela.

Alors de quoi s'agit-il ? Qu'est-ce qui nous fait si peur ?

De voir s'effondrer nos belles citadelles, nos certitudes, nos vérités préétablies ?

Si 1 et 1 font 2, ça ne marche pas comme ça dès qu'il y a de l'humain. Vivre n'est pas une science exacte. Et moi, je trouve ça plutôt pas mal. Arrêtons de nous mentir, accueillons nos propres ambiguïtés, devenons des vivants, ayons de la tendresse pour nous-mêmes, construisons pas à pas notre être intérieur, nous deviendrons alors, seulement, assez libre pour aimer.



02/06/2013
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